Soi, les autres, Dieu et la nature
Salut! Terre, une œuvre qui donne du sens à un sacrement avec lequel on se trouve souvent embarrassés.
Salut! Terre, une œuvre qui donne du sens à un sacrement avec lequel on se trouve souvent embarrassés. Il faut entendre des phrases comme celle-ci : « On ne peut pas déplacer l’âge de la confirmation parce que s’ils ne la font pas au primaire, ils ne la feront jamais! » Étrange réflexion qui porterait à dire : eh bien, s’ils ne la font pas, c’est que leur cheminement de foi n’est pas arrivé à maturité. Donc, raison de plus pour laisser à l’Éternel-le le soin de cheminer avec eux jusqu’à ce qu’ils soient en mesure de s’engager réellement. Ce qui signifie qu’il faut accepter d’attendre l’âge où ils seront saisis par l’Esprit Saint, sachant pertinemment que son heure ne nous appartient pas.
Mais voilà que nous trouvons ici des gens qui décident de s’engager à fond dans le déploiement de la confirmation des jeunes en leur proposant un processus de croissance personnelle et communautaire. Dès le début de la lecture de l’itinéraire, un lien se fait avec d’autres mouvements jeunesse : R3, Jeunes Cursillos, la Flambée, l’Étincelle, qui tous proposaient trois axes importants de développement : relation à soi-même, aux autres et à Dieu. Ces mouvements permettaient aussi aux jeunes de se réunir régulièrement pour continuer d’approfondir ce qui a été mis en œuvre lors de leur fin de semaine. Ils ont donné des fruits pertinents et magnifiquement constructifs.
Parallèlement à ces mouvements réunis sous la triple dimension soi, les autres et Dieu, on trouvait aussi, il y a 25 ou 30 ans, les mouvements Jeunesse du monde et ceux d’Action catholique dont il reste encore la JEC et la JOC. Ces deux derniers avaient l’originalité de travailler avec une méthode d’analyse de leur milieu de vie ou du monde en général. Ils dérangeaient (et dérangent toujours) par leur questionnement de l’ordre des choses et leur souci d’aller toujours plus loin avec la valeur évangélique de la justice sociale. Leur prise de parole a même suscité une méfiance chez certains évêques. Ceux-ci ont diminué leur appui ou cessé de subventionner ces mouvements. Des communautés religieuses féminines ont poursuivi le soutien accordé à ces groupes.
Intéressant aussi cette mise en valeur de ceux et celles qui ont développé un leadership plus grand et qui vont rencontrer une communauté amérindienne. Cela se situe en droite ligne avec la commission Vérité et réconciliation. Se fréquentant les uns les autres, ces grands adolescents apprennent à reconnaître leur valeur réciproque. Il devient possible d’espérer que leur regard mutuel change le cours de leurs opinions sur ce qu’est l’autre, ce qu’il vaut, ce qu’il a vécu. Évidemment, une semaine constitue un temps relativement court. Mais il est de ces expériences transcendantes qui passent comme un souffle sur l’âme. Osons imaginer que ces rencontres entre Amérindiens et Blancs amènent un émerveillement sincère sur ce qu’est l’autre, une conscience de sa dignité intrinsèque, et un souci de rendre témoignage de leur expérience dans une société où la méfiance entre nations domine sur la tolérance et le respect mutuel.
Salut! Terre trace un chemin neuf au milieu de ces mouvements d’édification des jeunes. En alliant la dimension de la nature aux autres dimensions, Salut! Terre doit faire sourire Henry David Thoreau qui, au XIXe siècle, se passionnait pour la nature. Les différents mouvements écologistes ou les tenants de la décroissance actuels le considèrent comme l'un des pionniers de l'écologie, car il ne cesse de replacer l'homme dans son milieu naturel et appelle à un respect de l'environnement1. Il écrivait : « La nature à chaque instant s’occupe de votre bien-être. Elle n’a pas d’autres fins, ne lui résistez pas. » Ou encore : « Je rêve d'un peuple qui commencerait par brûler les clôtures et laisser croître les forêts! » Salut! Terre offre à des jeunes de grandir avec cette nouvelle façon de concevoir la relation à la Terre, qui consiste à prendre soin d’elle et à lui porter du respect, et de le faire en Église. Résonance aussi avec François d’Assise qui, déjà au XIIIe, siècle pratiquait l’amour de la nature.
Les jeunes ne sont plus à l’église. Pourtant, ils peuvent aimer faire Église dans cet ailleurs où ils se sentent entendus, reconnus et utiles, où une mission d’attention aux autres les interpelle. Ils peuvent aimer faire Église dans le développement de tout leur être avec d’autres et surtout avec des adultes significatifs qui les accompagnent dans leur parcours d’identification et les ouvrent au monde avec audace et confiance. Matthew Fox aspire à la grâce originelle en lieu et place du péché originel! Il propose une via positiva qui est une manière de goûter les beautés et les profondeurs cosmiques de la création, c’est-à-dire, nous et tout ce qui existe. Sans cette connaissance de base des pouvoirs de la création, l’ennui nous gagne et nous devenons violents2. Il semble bien que Salut! Terre s’inscrit dans cette via positiva.