Sentiers de FoiVolume 05 - no 14

Les chrétiens et les animaux

Richard Chartier
Dans le monde occidental, l’émergence de la protection animale se développe dès le XVIe siècle en Angleterre avec l’arrivée de nouvelles sensibilités envers les animaux1 appuyées par l’enseignement religieux et philosophique de l’époque.
Dans le monde occidental, l’émergence de la protection animale se développe dès le XVIe siècle en Angleterre avec l’arrivée de nouvelles sensibilités envers les animaux1 appuyées par l’enseignement religieux et philosophique de l’époque. Les protestants ont depuis longtemps développé une approche différente des catholiques par rapport à la nature et aux animaux. Ils considèrent en effet que protéger l’animal est un devoir moral pour le bien de l’humanité, rapprochant l’homme du plan de Dieu sur le monde. En 1824, à Londres, la première société de protection animale au monde voit le jour sous le nom de Society for the Prevention of Cruelty to Animals (SPCA). Le fondateur est un pasteur, le révérend A. Broone. Des réformateurs protestants d’autres pays s’inspirent de cette œuvre humanitaire qui désire combattre la violence et la souffrance des créatures innocentes et fondent des SPCA à New York (1828), au Massachusetts (1835), au Wisconsin (1838), à Paris (1845) et à Montréal (1869). Pendant ce temps, l’Église catholique demeure généralement silencieuse sur la question animale jusqu’à tout récemment alors que Jean-Paul II a déclaré, en 1979, que la « protection animale est une éthique chrétienne ». Alors que les protestants réfléchissent depuis longtemps sur une théologie de l’animal – le pasteur Andrew Linzey, auteur de plusieurs ouvrages sur la théologie et l’animal, dirige depuis 2006 le département « Oxford Centre for Animal Ethics » de l’Université d’Oxford, le premier centre universitaire théologique sur l’animal au monde –, les catholiques préoccupés par la question animale tentent, de leur côté, d’établir une théologie catholique de l’animal, développée principalement par des laïcs. Soulignons le travail extraordinaire de Jean Gaillard, cofondateur avec Marguerite Prestreau, en France, de l’Association catholique pour le respect de la création animale2, qui a rédigé de nombreux textes sur les animaux et le christianisme. Citons un extrait de l’introduction de son livre Les animaux, nos humbles frères3 : « ... Les Églises chrétiennes ne se sont pas assez souciées du sort des animaux et du comportement de leurs fidèles envers eux. Elle provoque une réelle incompréhension chez ceux qui aiment les animaux et les éloigne souvent du christianisme, ce dont la majorité des chrétiens n’a même pas conscience, convaincus que les animaux n’ont rien à voir avec la religion. Cela est dommageable pour les animaux, pour les hommes et pour la religion. » Une autre organisation française, la Fraternité sacerdotale internationale pour le respect de l’animal (FSIRA)4, fondée en 2004, « a la particularité d’être composée majoritairement de prêtres de l’Église catholique qui souhaitent promouvoir le débat sur l’animal au sein de leur Église. Elle part du constat que, pour l’Église de ce début du XXIe siècle, du fait de l’ère de l’industrialisation et de sa mondialisation, l’animal n’occupe plus la place que Dieu lui a accordé, notamment dans les textes fondateurs du judaïsme et du christianisme, textes de la Genèse et d’Isaïe5 ». Le fondateur, l’abbé Olivier Jelen, écrivait dans le bulletin (03-09) de l’organisme : « Notre Fraternité en appelle à l’ouverture des consciences, également dans l’Église, à la condition animale. Ouvrons les consciences de nos contemporains à l’importance d’une bonne gestion de la Création. Aucun être vivant ne doit souffrir du manque de respect à son égard. Dieu ne pose-t-il pas son regard aimant de Créateur sur tous les êtres vivants? » Je suis membre de ces deux organismes qui m’appuient et m’encouragent dans mon travail de sensibilisation ici au Québec. Lors des derniers JMJ à Sydney où j’ai animé un atelier sur François d’Assise et le respect de la création animale, ils m’ont généreusement aidé à défrayer les frais de voyage. Au Québec, il n’existe aucune association catholique pour la défense des animaux et, malgré mes efforts, je n’ai obtenu jusqu’ici aucun résultat. Les Québécoises et Québécois demeurent très distants sur cette question, contrairement aux autres provinces du Canada où l’on retrouve plusieurs organismes de défense et de protection des animaux. Même nos lois sont désuètes et dépassées! Nous sommes encore imprégnés, probablement de manière inconsciente, de l’ancienne mentalité de l’Église catholique qui enseignait que l’homme devait dominer et exploiter la nature, y compris l’animal. En effet, au lieu de considérer l’animal comme un frère à la manière de François d’Assise, les catholiques d’ici, et le peuple québécois en général, éprouve beaucoup de difficulté à poser un regard neuf sur l’animal et à renouveler ses rapports avec lui. Malgré tout, je garde espoir de voir un jour une organisation catholique ou œcuménique pour la défense et la protection des animaux au Québec, car je sais que l’Esprit Saint travaille fort...

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Volume 05 - no 14
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