Sentiers de FoiVolume 03 - no 08

La véritable montagne

Charles Bilodeau
Au Québec, nous avons la chance d’avoir plusieurs camps de vacances en pleine nature.
Au Québec, nous avons la chance d’avoir plusieurs camps de vacances en pleine nature. Que ce soit pour une expédition en montagne, en canot ou en vélo, ce n’est pas le choix qui manque! Si l’on s’attarde seulement aux visées proposées par les divers camps de vacances, le camp En piste ne semble pas se démarquer des autres. Il faut simplement vivre l’expérience pour réaliser toute la différence! Au premier abord, le principal défi du camp En Piste semble être d’escalader la montagne de rocs ou encore de parcourir les sentiers pédestres en forêt. Tel n’est pourtant pas le principal défi, même si montagnes et sentiers sont bel et bien au rendez-vous. Alors, quel est donc l’objectif du camp? À vrai dire, la montagne de rocs est seulement un prétexte afin que les jeunes découvrent des capacités en eux qu’ils ignoraient avant ce jour. Nous choisissons donc un parcours pédestre qui permet aux adolescents de vivre un véritable dépassement d’eux-mêmes. Je me souviendrai toute ma vie de la fois où un jeune était persuadé de ne pas être capable de se rendre au sommet du mont Bigelow, d’une hauteur d’environ 1 400 mètres. Durant les trois premiers jours de sentiers, chacun des membres de l’expédition avait eu à porter le sac à dos de ce jeune à tour de rôle. Arrivés au pied de cette fameuse montagne, les autres moniteurs et moi avons décidé qu’il allait le porter lui-même jusqu’au sommet. C’est alors que ce jeune décida de ne plus avancer, mentionnant qu’il préférait tout lâcher. Désemparé, il piqua une crise, puis, d’un coup sec, il reprit son sac à dos et partit vers le sommet. Lorsque nous sommes arrivés au sommet, ce fut l’un des premiers à crier haut et fort sa fierté : il venait d’accomplir ce qui lui semblait impossible. C’est pour des garçons comme lui qu’existe le camp En Piste. Découvrir que ce ne sont pas les montagnes de rocs qu’il importe de gravir, mais celles qui sont faites de chair, n’a pas de prix puisqu’on est appelés à les surmonter tous les jours de notre vie. L’apport du camp aux jeunes d’aujourd’hui À l’adolescence, le jeune découvre graduellement sa propre identité. C’est aussi en cette période qu’il est le plus fragile intérieurement, car il apprend à nommer ce nouvel espace que l’on nomme intériorité. En tant que moniteurs, nous sommes conscients de la fragilité qui est propre à l’adolescence. En ce sens, l’expérience du camp permet aux jeunes de faire une triple découverte en rapport avec eux-mêmes. Tout d’abord, comme je l’ai mentionné précédemment, la randonnée en montagne sert de prétexte à l’expérience du dépassement de soi : faire l’ascension d’une montagne permet une descente intérieure. Ensuite, nous essayons d’amener les participants à comprendre l’importance d’être en communion les uns avec les autres. En d’autres mots, de se mettre au service des autres. Un soir que nous étions en montagne, nous devions faire la vaisselle du souper avant d’aller nous coucher. Comme il était très tard, la majorité était déjà partie se coucher en laissant les autres faire la vaisselle. Le lendemain, nous avons dû nous parler en vérité et nous dire comment chacun s’était senti devant cette situation. Bien que cette discussion ait retardé d’au moins deux heures notre départ, ce fut pour les jeunes un élément déclencheur qui leur a permis de comprendre ce qu’est la vie d’équipe : un frère ne laisse pas un autre frère sans avoir terminé toutes les tâches. Ainsi, à travers l’expérience de la montagne, le camp a permis aux jeunes de se décentrer d’eux-mêmes pour aller vers les autres. Tel est le vrai chemin de l’amour, tourné vers l’autre. Enfin, le camp offre aux jeunes d’approfondir leur foi ou tout simplement de laisser libre cours à leurs questionnements. En effet, plusieurs questions concernant Dieu les habitent. « Si Dieu est amour, pourquoi y a-t-il encore de la guerre dans le monde? »; ou encore « J’ai prié Dieu pour qu’il guérisse ma mère du cancer, mais elle est décédée quand même ». En prenant le temps de parler avec les adolescents sur ce qui les habite à propos de Dieu, j’ai appris que les jeunes ont besoin d’adultes qui puissent les écouter s’exprimer sans les juger. Je sais aussi qu’il est nécessaire pour tout jeune de passer par ces questionnements, car c’est de cette manière qu’une foi en Dieu pourra se vivre en profondeur, dans sa propre intériorité. Le regard d’un moniteur Par le moyen des randonnées en montagne, je constate que le camp En Piste permet aux adolescents de développer leur estime d’eux-mêmes et la qualité de leurs relations interpersonnelles tout en se questionnant sur leur foi. Ce travail m’a donné aussi l’occasion de saisir plus en profondeur l’immense beauté des jeunes. Vraiment, le camp En Piste n’est pas comme les autres!

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La véritable montagne

Volume 03 - no 08
Au Québec, nous avons la chance d’avoir plusieurs camps de vacances en pleine nature.