Du questionnement plus que des réponses
Pour le chrétien en devenir, il ne peut y avoir de véritable catéchèse – cette expérience qui permette une meilleure compréhension des facettes de la vie chrétienne dans une démarche visant à approfondir une relation intime avec le Christ – sans mise en présence de la parole de Dieu.
Pour le chrétien en devenir, il ne peut y avoir de véritable catéchèse – cette expérience qui permette une meilleure compréhension des facettes de la vie chrétienne dans une démarche visant à approfondir une relation intime avec le Christ – sans mise en présence de la parole de Dieu. Il y a plusieurs façons d’approcher la Bible. Pour Mme Colette Beauchemin1, la Catéchèse biblique symbolique (CBS) y donne accès de façon privilégiée.
Le retour aux sources pour une pédagogie originale
« La plupart des parcours catéchétiques actuels sont bibliques et invitent à raconter les récits bibliques, mais bien souvent dans une visée historique, doctrinale ou morale, affirme Mme Beauchemin. L’originalité de la CBS tient plutôt à sa pédagogie de la Parole inspirée des Pères de l’Église » qui conduit à dépasser le sens littéral pour découvrir le sens symbolique de la Bible. Pour elle, « si on apprend à raconter la Bible, c’est pour la "parler" jusqu’à ce qu’elle devienne parole de Dieu, dans l’intériorité du croyant. La pédagogie est tout à fait différente de celle de l’enseignement, puisqu’elle ne vise pas à transmettre un savoir préétabli. Il s’agit plutôt d’accompagner le processus de transformation de la Parole, pour en venir à y entendre l’écho (du mot grec catéchèse) de la parole de Dieu. » En laissant jaillir, à son écoute, les étonnements et les interrogations, « en cherchant ensemble des échos ailleurs dans les Écritures et dans notre expérience, poursuit Mme Beauchemin, on peut arriver à comprendre ce que Dieu veut nous dire personnellement aujourd’hui. » Ce cheminement ne peut se réaliser dans l’enfance « puisque l’enfant de 10 ans ne fait qu’entrer dans la parole critique. C’est plutôt un travail de longue haleine. »
Faillite de la pédagogie explicative
Dans le courant du renouveau catéchétique des années 1970, les Français Jacqueline et Claude Lagarde recueillent des milliers d’enregistrements ayant pour but « de comprendre comment "les enfants comprennent" ». Cet outil précieux dévoile qu’à la fin de l’enfance, les jeunes, souvent, ne croient plus. Le couple décide de laisser la parole aux jeunes qui, malgré les enseignements reçus, sont insatisfaits dans leur quête de sens. « Les questions des ados indiquent clairement l’incompréhension du sens figuré et des significations du langage religieux » souligne Mme Beauchemin. Programmé « de l’extérieur, le langage biblique et liturgique reste figé dans la sphère du sacré, mais devient vite sans intérêt, car sans résonance dans la vie de l’adolescent. » Il devient clair alors pour les Lagarde qu’il faille donner l’occasion au jeune d’élaborer lui-même, en collaboration avec les autres, ses « représentations de l’intérieur », de faire lui-même les rapprochements entre un texte et un autre, de développer une « vision élargie, une nouvelle synthèse de sens. Résultats : un développement spectaculaire d’une intériorité spirituelle qui grandit au contact des récits bibliques », rappelle Colette Beauchemin.
Un courant qui traverse l’Atlantique
Les recherches et les intuitions des Lagarde trouvent un écho enthousiaste au Québec. L’Institut de pastorale des Dominicains les invite à la fin des années 1980. Le couple y offre ensuite, tous les deux ans environ, de la formation « tout en profitant de l’occasion pour aller rencontrer des gens un peu partout en région. Leur influence s’est étendue assez discrètement, mais graduellement, jusqu’à ce jour. » Dans les années 1990, « le service d’animation pastorale de la commission scolaire des Grandes-Seigneuries, sur la Rive-Sud de Montréal, devient un lieu particulièrement actif sur le plan de la formation de l’expérimentation en Catéchèse biblique symbolique ». Pendant ce temps, d’autres expérimentations de l’approche se réalisent un peu partout au Québec. En juin 2003, la naissance de l’Association québécoise de la Catéchèse biblique symbolique favorise la création d’un certain réseau, plus officiel, entre les différents praticiens de la CBS. Depuis, les diocèses de Saint-Jean-Longueuil (Rive-Sud de Montréal), de Saint-Hyacinthe, de Saint-Jérôme, de Québec et de Trois-Rivières, en particulier, « offrent une formation diocésaine pour ceux qui souhaitent utiliser cette approche catéchétique, précise Mme Beauchemin. Actuellement, la plupart des praticiens de la CBS utilisent un parcours corédigé par le diocèse de Saint-Jean-Longueuil – Madame Beauchemin y a participé –, et les auteurs Claude et Jacqueline Lagarde. Ce parcours intitulé Un chemin d’Emmaüs circule par voie électronique. » Un parcours marginal « La CBS éveille la curiosité, intrigue autant qu’elle déstabilise », conclut Mme Colette Beauchemin. Elle nous confie que, bien qu’expérimentée à petite dose dans sept ou huit diocèses au Québec, la CBS demeurera toujours marginale... car elle requiert une part d’audace, de l’ouverture d’esprit et une certaine confiance personnelle.« La CBS vise à développer la parole croyante de chacun, le positionnement de chacun dans sa parole de foi à travers la prise de parole de chacun, puisque essentiellement on pourrait dire que le Verbe de Dieu est en nous, pas dans le livre qu’est la Bible. » Colette Beauchemin