Sentiers de FoiVolume 02 - no 15

Leadership en Église : « le pouvoir partagé »

Guy Lagacé
Je vous livre ici ma vision du leadership.
Je vous livre ici ma vision du leadership. Bien que j’esquisse quelques notions qui touchent cette réalité au cœur de la gestion d’une organisation, je veux surtout vous faire part de mon rêve de voir un jour un dirigeant « maillé » promouvoir la nouvelle philosophie de gestion en réseau dans son Église locale. La plupart des recherches portant sur cette dimension de la gestion qu’est le leadership en arrivent à la conclusion qu’il est impossible d’en donner une définition fixe. Il semble bien que le leader d’un groupe exerce une influence certaine au sein de celui-ci, mais toutes les formes d’influence ne constituent pas nécessairement un signe de leadership. Il est probable qu’étudier le leadership, c’est aussi rencontrer divers types et lieux d’influence qui prévalent au sein de l’organisation; c’est aussi prendre conscience de l’organisation du pouvoir par les individus. Parler de leadership dans un contexte institutionnel, c’est nécessairement faire référence au style de gestion (management) qui prévaut dans cette organisation, c’est-à-dire porter un regard sur la manière de diriger, d’exercer « le pouvoir et l’autorité » et de vivre le processus de décision. Le leadership s’exerce normalement selon une philosophie de gestion particulière : gestion autoritaire, pyramidale, démocratique, collégiale, etc. Force nous est de reconnaître que l’institution ecclésiale s’inspire du modèle pyramidal traditionnel. Cependant, certains changements structuraux organisationnels peuvent laisser croire qu’une gestion plus démocratique est en émergence et se rapprocherait de la nouvelle philosophie de gestion avec un leadership particulier que nous retrouvons dans certaines organisations. Il est permis d’imaginer l’Église comme une entreprise-réseau qui reconnaît que chaque membre peut être agent-auteur-acteur; toutes et tous deviennent importants dans les changements que doit vivre ladite institution. Chaque membre, même s’il n’est pas gestionnaire, découvre lui aussi une liberté de penser, d’agir et de décider; tous les acteurs sont « maillés ». Je veux, par cette expression, signifier que les hommes et les femmes de cette institution peuvent fonctionner par des alliances stratégiques en mettant fin à l’isolement qui stigmatise le progrès et la créativité. Dans une telle philosophie de gestion par réseau, le dirigeant « maillé » croit que gérer, c’est créer la vie, et non maintenir l’ordre; c’est bâtir la communauté plutôt que sauver la structure; c’est servir la mission plutôt que l’institution, sans nier à celle-ci sa raison d’être et son spécifique. Selon moi, on peut caractériser un dirigeant « maillé » dans une Église-réseau, en l’occurrence l’évêque, ainsi : un donneur de souffle et de sens, un vrai multiplicateur. Il devient un leader qui, au lieu de s’appuyer sur son pouvoir de contrainte institutionnelle, va utiliser son pouvoir d’influence pour mettre les membres de l’institution en situation de régler eux-mêmes les problèmes rencontrés. Il compte surtout sur son aptitude à mettre en contact ses collaboratrices et collaborateurs, entre eux et avec leur environnement, pour qu’ils trouvent eux-mêmes les meilleures réponses aux problèmes qu’ils affrontent dans un processus de changement. Le pouvoir circule et personne ne peut se l’arroger; le pouvoir se multiplie dans l’organisation, sans retrancher de pouvoir à quiconque. Ce « pouvoir partagé » n’est pas exclusif aux leaders formels de l’institution; d’autres acteurs peuvent exprimer du pouvoir dans leur organisation sans être reconnus officiellement. Si, dans le management traditionnel, on redoute les leaders parce qu’ils peuvent contester le leadership formel, dans le réseau, on est convaincus qu’il n’y aura jamais assez de leaders. J’entrevois cette nouvelle réalité dans un avenir rapproché en autant que l’institution ecclésiale reconnaisse en ses leaders formels (évêque, dirigeant ou dirigeante de communauté chrétienne) des dirigeants « maillés ». La patience est de mise dans ce passage du pouvoir prêté au pouvoir donné, selon la belle expression de Sérieyx. C’est dire que cette nouvelle philosophie de gestion par réseau remet en cause tout le processus décisionnel dans une organisation ecclésiale.

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